Par S.W.

Il était une fois, dans l'est de Paris, une coquette maison... Impeccablement tenue, elle intriguait les voisins qui souvent aux fenêtres guettaient avec curiosité le ballet d'allers et venues des visiteurs. Ne pensez surtout pas que c'était un moulin à vent, ouvert à tous, ou qu'il s'y passait des choses… inavouables. Oh que nenni. Cette maison, en fait, était un temple… celui du verre ! N'y entrait pas qui voulait et pour ce faire il fallait montrer patte blanche. Un protocole, plus sévère que l'étiquette de la cour d'Autriche, dictait les règles aux visiteurs. Les maladroits qui l'outrepassaient se souviennent encore des remontrances du maître des lieux. La première épreuve était la présentation. Si ici elle se passait de révérence, elle ne se passait pas de références. Les bienheureux qui passaient cette première épreuve faisaient face à la suivante, ô combien périlleuse, pour certains, comme pour moi, celle de la ponctualité. Qu'il pleuve ou qu'il vente, n'y changeait rien ! La ponctualité avant tout. Elle restait de mise envers et contre tous. Rien ne courrouçait plus notre héros que d'attendre les retardataires. Alors il marchait, comme un ours en cage, derrière les barreaux de son grillage et vous foudroyait de son regard bleu à votre arrivée tardive. La dernière épreuve consistait à faire le silence quand il examinait les pièces où les défauts se devaient d'être soulignés. Sous peine d'excommunication, interdiction nous était faite d'en raconter l'histoire. Son acquisition, l'accident qui la menait ici sur cette table d'intervention, ou encore l'intérêt qu'on lui portait. Alors me direz vous, cet homme est un monstre ! Et vous, maso, non ? Et bien figurez vous que non. Comme on dit si bien et si souvent, rien n'est jamais tout noir ou tout blanc. Car sans le talent de notre héros que vous aurez tous reconnu, à travers le portrait que je viens d'en faire, et qu'il aura, je l'espère, la bonté de me pardonner, il aurait été quasiment impossible à la plupart d'entre nous de devenir des marchands de verreries. Avec talent et discernement, il a mis à notre service un savoir faire rare de restaurateur. Par son sens inné de l'art nouveau, il a redonné vie et forme à des objets qui semblaient souvent condamnés à l'oubli et qui pour certains ont écrits l'histoire de la verrerie 1900. Pour cela, cher Michel, je tiens à vous rendre un hommage sincère et j'espère que vous rendrez encore longtemps vie à nos verreries.
S.W.