La verrerie de Soisy-sur-Ecole et Michel Détré par Frédéric Alary

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  Oursins

  
  Michel Détré nous fit dernièrement souffler des pièces aux formes simples et épurées. Ce sont des pièces uniques réalisées à main levée, c'est-à-dire sans moule.
  Ces vases sont la matière première, la base du travail, sur laquelle il peut librement s'adonner à sa technique préférée, le travail à la roue. Michel Détré, longuement, patiemment, recouvre la surface des vases de petites incisions afin de créer des motifs, des rythmes, et d'en faire des pierres précieuses, des galets uniques, des oursins mystérieux.
  L'artiste, encouragé par ses amis et sa galeriste, va perfectionner cette technique jusqu'au point naturel où du perfectionnement va naître une nouvelle série : Les « Oursins » filigranés Cette série est pour nous, verriers, un passionnant challenge. Michel Détré souhaite que le relief des pièces ne soit pas seulement apporté par ses gravures, mais ébauché à chaud. Pour ce faire, nous avons recours à la technique vénitienne des filigranes. Les filigranes sont des baguettes de verre colorées traditionnellement utilisées pour décorer les pièces. Pour fabriquer une pièce filigranée, on commence par étirer des baguettes de verre, colorées à l'intérieur et recouvertes de verre incolore (filigrane « a fili »). Puis ces baguettes sont utilisées pour fabriquer des filigranes plus complexes (filigranes ballotini, zanfirico, reticello, etc…)
  Ici, on a détourné la technique de base pour obtenir l'effet recherché. Si, traditionnellement, les filigranes sont fondus dans la masse de verre, ici, le challenge consiste à les garder en surface sans les fondre, afin d'en conserver tout le relief. Cela complexifie le soufflage de la pièce car le relief empêche de façonner le vase de manière traditionnelle. De même, pour ne pas fondre les filigranes, il faut être très vigilant lors des phases de réchauffe du verre et travailler le plus « froid » possible. Un certain nombre de pièces sont cassées, mises au rebut, notamment en raison du grand nombre de fils souhaités par Michel Détré : les fils sont en effet peu espacés. Ils peuvent ainsi se toucher lors du soufflage et restés collés les uns aux autres. Raffinement supplémentaire, des petites taches noires sur les filigranes blancs : elles sont obtenues en étirant un cordon de verre noir autour de la pièce. Le cordon ne se colle que sur les fils restés en reliefs. La pièce est alors réchauffée et tournée rapidement. Le fil fond, et les parties du cordon suspendues entre deux filigranes se décollent et tombent dans le four.
  Nous en sommes là aujourd'hui, mais je sais que la passion de Michel Détré pour le verre nous emmènera encore ailleurs et nous surprendra. Cet entrain, ce renouvellement, cette ténacité face aux problèmes que l'on a pu rencontrer, en font un homme que j'admire et que j'estime beaucoup. Notre collaboration m'a beaucoup apporté. L'artiste a accompagné mes débuts à la verrerie, et a toujours encouragé mes progrès techniques ainsi que mes premières créations.
  
  Lien vers les oursins
  
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  La verrerie de Soisy-sur-Ecole a été crée en 1978 par ma grand-mère, Elizabeth Giraud.
  Elle était alors directrice de la verrerie de La Rochère, en Haute-Saône, la plus ancienne verrerie de France encore en activité, et cela depuis 1475. La création de la verrerie lui avait été inspirée par le mouvement « Glass studio », apparu dans les années soixante. Ce mouvement entraîna l'apparition de petits ateliers de verrerie, destinés à des productions d'objets de petites séries ou artistiques, alors que le travail du verre à la canne n'existait jusqu'ici qu'au sein de structures importantes orientées vers la production de masse. C'est ma mère, Marie Alice Alary, qui fut désignée pour gérer la verrerie. Le matériel, les hommes et le savoir-faire originel de Soisy provenait de la « maison mère », La Rochère. Ma mère, alors novice dans le travail du verre, a fait petit à petit évoluer les créations et les techniques. Pour cela, elle voyagea en Suède, aux Etats-Unis et en Italie, à la rencontre d'autres façons de travailler. Maman rencontra Michel Détré dans les nouveaux établissements de Soisy-sur-Ecole. Ce fut le début d'une longue et amicale collaboration pendant laquelle l'artiste vint utiliser les ateliers, principalement pour des activités de restauration de verreries anciennes. C'est plus récemment, depuis 2008, qu'il utilisa le verre comme support à son expression artistique personnelle.
  
  Coupes « visages »
  Michel Détré commença donc en 2008 par réaliser une série de coupes. Les coupes « visages » sont des pièces soufflées dans des empreintes faites dans du sable humide. Un modèle en terre cuite est d'abord sculpté par l'artiste.
  Ce modèle est ensuite pressé dans du sable humidifié pour en réaliser une empreinte. Puis le verre est soufflé dans cette empreinte, qui doit être refaite à chaque opération. Les pièces ainsi soufflées sont retaillées à la roue par Michel Détré pour faire apparaître les détails des visages.
  
  Les nus
  Nous avons réalisé une autre série, dans des moules en fonte cette fois. Cette série est constituée de 3 bas-reliefs différents. Des modèles en terre cuite sont sculptés par l'artiste, puis envoyés dans une fonderie pour en faire des moules en fonte, à l'intérieur desquels sera coulé le verre en fusion. Ce qui peut paraître simple ne l'est pas. Le plus grand de ces bas-reliefs nécessite de couler 3,5 kg de verre en une seule fois. Toute l'expérience et l'habileté de notre verrier, Nicolas Pinquier, est nécessaire pour y parvenir.
  
  Graal
  Vinrent ensuite des pièces réalisées selon la technique suédoise du Graal. Une paraison avec plusieurs couches de couleur est soufflée puis mise à refroidir. La pièce est ensuite travaillée à la roue par Michel Détré pour faire apparaître des dessins à travers les couches de couleur. Enfin, cette paraison est réchauffée, remise au bout d'une canne, recouverte d'une couche de verre en fusion et façonnée pour donner la forme définitive à l'oeuvre. Cette technique a été abandonnée par Michel Détré car le dessin manque de finesse à l'intérieur de la pièce terminée.